jeudi 3 décembre 2009

Fear and Loathing in the 60's

Principalement connu pour son livre Las Vegas Parano (Fear and Loathing in Las Vegas), Hunter S. Thompson est à l'origine d'un nouveau style journalistique brisant la prétendue distance objective pour faire place au subjectivisme le plus total.

« Le vrai reportage gonzo exige le talent d'un maître journaliste, l'œil d'un photographe artiste et les couilles en bronze d'un acteur » expliquait Hunter S. Thompson, barricadé dans son ranch de Woody Creek. Avant de terminer en sauvage parano accueillant ses visiteurs armé d'un Magnum 44, avant d'éructer contre une « nation dirigée par des porcs » et avant de se suicider d'une balle dans la tête en 2005, l'écrivain américain a sillonné les routes et raconté les États-Unis brut de décoffrage, baignant dans leur jus. Il invente, du même coup, un nouveau style d'écriture : le gonzo journalisme.

S'exprimant toujours à la première personne, l'auteur affublé de Ray-Ban fumées et d'un porte-cigarette détonne dans le monde du journalisme avec ses commentaires incendiaires sur la politique et ses aventures psychédéliques.

Sur le sol poussiéreux de l'Amérique

D'Hunter Thompson, on se souvient de chroniques footballistiques boueuses, de sa couverture de la présidentielle de 1973 émaillée des pires insultes à l'encontre du candidat Nixon, de ses rencontres alcoolisées avec Robert Kennedy ou Mohammed Ali… Ses papiers écrits à la dernière minute, la machine à écrire posée sur le capot d'une Cadillac rouillée, les notes gribouillées (griffonnées ?) s'éparpillant sur le sol poussiéreux mais fertile de l'Amérique, Hunter Thompson raconte sa vie, ses impressions face aux grands de ce monde comme face aux populations débraillées qu'il rencontre au détour d'un comptoir de bar.

Persuadé que le meilleur journaliste est celui qui vit le monde, qui expérimente son sujet au lieu de le regarder, Hunter Thompson passera deux années sur la route aux côtés des Hell's Angels, ces motards anarchistes qui faisaient trembler les bonnes mœurs américaines. Il bichonne sa Harley, porte le blouson de cuir à frange et s'enquille des bières vitesse grand V mais n'oublie jamais son sujet. Entre 1963 et 1965, il bouffe les kilomètres, réchappe d'un accident de moto haute voltige, habite dans des squattes et décrit, entre deux rixes, cet autre American Way of life.

Sur les mêmes routes que la Beat Generation

Au fil des trips – dans tous les sens du terme – Hunter Thompson croise la Beat Generation, un nouveau mouvement libertaire mélangeant art et drogue. Pas parti du même port mais arrivé dans les mêmes sphères, Hunter Thompson devait forcément croiser la Beat Generation car l'auteur gonzo et les beatniks errent sur les mêmes routes. Un chemin imposé dans cette période entre deux mondes. Allen Ginsberg et William Burroughs apparaissent au milieu d'une bagarre ou autour d'un scotch on the rocks. Ils symbolisent, entre autres, cette génération où l'errance est la base d'une réflexion sur la société. Dessiné à Londres par une jeunesse qui revisite le rock'n'roll pour en faire une musique underground, ce mouvement estampillé Swinging 60's conquiert les États-Unis.

Dopées par ce nouveau rock dévergondé, les années 60 s'expriment avec une nouvelle verve. Plus violente, plus militante, plus personnelle. Dopé par son indépendance, Hunter Thompson s'inscrit en parallèle de ce foyer artistique où l'homme est désinhibé face au monde. L'écrivain américain donne un nom à un journalisme libéré, assoiffé de réalité. Tellement 60's.

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